Le PCF s’est toujours voulu un « parti d’avant-garde » et, à la différence de son homologue italien, il n’a jamais théorisé la notion de « parti de masse ». Il est pourtant le seul parti politique français à accorder autant de place au recrutement de ses adhérents. Les campagnes d’adhésion, au même titre que le soutien à la presse communiste, sont en elles-mêmes des moments structurants dans la socialisation communiste. L’affiche donne un aperçu de cet effort et de son rôle dans la vie de l’organisation.

Première moitié des années 1920, Archives du PCF – Archives départementales de la Seine-Saint-Denis (AD 93).

Dans les premières années de l’existence du Parti communiste, la lutte politique se confond avec la « guerre des classes » et le parti se veut une armée, émule des prestigieux bolcheviks russes. N’entre pas qui veut dans la Section française de l’Internationale communiste : on doit d’abord faire ses preuves, car le but est de « serrer les rangs » et non de faire carrière.

1945, Archives du PCF – AD 93.

En 1945, le PCF est auréolé du martyr de ses « 75 000 fusillés » et il se prépare à être le « premier parti de France ». Il n’est plus une section de l’Internationale, mais un parti national drapé dans le tricolore. Il n’est pas pour autant un parti comme les autres. Le marteau et l’enclume ont ainsi une double signification : symboles du travail ouvrier, mais symboles aussi d’un parti stalinien qui ne transige pas et qui a su se tremper dans les épreuves (Staline n’est-il pas un surnom construit autour du mot russe « Stal » qui désigne l’acier ?).

1954, Archives du PCF – AD 93.

À partir des années trente, le culte des personnalités s’installe dans tout le mouvement communiste mondial. En 1964, le PCF a amorcé sa prise de distance avec le stalinisme, mais la personnalité de Thorez reste un identifiant d’autant plus fort que l’homme a acquis une incontestable stature nationale. Ses obsèques ont rassemblé une foule considérable et l’affiche éditée après sa mort suggère la continuité parfaite dont se réclame alors le parti.

1975, Archives du PCF – AD 93.

Au milieu des années 1970, en pleine dynamique de l’union de la gauche, le PCF commence à enregistrer un flux exceptionnel d’adhésions, qui va le pousser à rêver du million d’adhérents que la Libération n’avait pas réussi à atteindre. Le parti travaille alors à modifier son image, celle d’un parti pas comme les autres, mais dont les adhérent-e-s reflètent la société dans sa diversité. En ce temps-là, le « féminisme » n’est pas encore à l’honneur dans le PC, mais sa féminisation est incontestable. À l’instar du monde ouvrier, on ne valorise plus la figure indistincte du collectif militant, mais la prise en compte de l’individu et de ses aspirations : le « je » n’ignore pas le « nous », mais ne se dissout pas dans son existence.

1977, Archives du PCF – AD 93.

Les années 1970 sont pour le PCF la décennie de l’ouverture vers une société bouleversée par ses « Trente Glorieuses » (1945-1975). Mais le mouvement en direction des couches intermédiaires est contrebalancé par la crainte d’une perte d’identité pouvant faire le jeu de l’allié-concurrent socialiste. En 1976-1977, la campagne contre la pauvreté (Vérité-Espoir) est un moment fort de ce travail de ré-identification. Elle n’empêchera pas le décrochage en faveur du PS mitterrandien.

1979, Archives du PCF – AD 93.

En 1979, le PCF n’est plus la première force à gauche, mais il pense pouvoir encore renverser la vapeur. Cette année-là, les premières élections européennes au suffrage universel sont l’occasion d’imposer l’image d’un PC plus soucieux d’affirmer l’indépendance française que de s’engager dans une construction européenne plus poussée. Sur fond de carte scolaire, l’affiche de l’atelier Grapus pour la campagne d’adhésion de 1979 est sans ambiguïté : le « J’aime mon pays » dit le caractère « avant tout national » du PC et de sa stratégie.

2000, Archives du PCF – AD 93.

En 1995, le successeur de Georges Marchais, Robert Hue, a lancé la thématique de la « mutation ». En 1999, il avance l’idée que le congrès à venir du PCF, en 2000, serait l’occasion de faire émerger un « nouveau parti communiste ». Mais si l’affiche du début d’année laisse entendre que l’on ira jusque-là, les oppositions à l’intérieur conduiront le noyau dirigeant à une construction plus classique.

2007, Archives du PCF – AD 93.

Dans la valorisation de l’organisation, le travail de mémoire garde son potentiel symbolique fort. La Résistance fait ainsi partie des moments privilégiés. En 2007, la tentative de récupération du jeune résistant communiste Guy Môquet, entreprise par le Président nouvellement élu, Nicolas Sarkozy, suscite la riposte du PCF. Le visage iconique du fusillé de Châteaubriant est remis à l’honneur, sous une forme originale : la mosaïque de photos utilisées en arrière-fond permet de fusionner le passé et le présent, le héros et le collectif militant.

2009, Archives du PCF – AD 93.

Quand s’achève la première décennie du XXIe siècle, le PCF est réduit aux marges électorales, mais il affirme qu’il continue la trace amorcée en décembre 1920. L’affiche du début 2009 est d’une simplicité maximale. Le rouge du tee-shirt et le poing dressé symbolisent la ferveur révolutionnaire maintenue, couplée à la modernité simple du jean. L’image brouillée de la télé rappelle que l’idéologie dominante est toujours là pour briser la lutte et la référence au « bien commun » est une manière de dégager le « communisme » de ce qui l’entacha au XXe siècle.