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La pensée n° 367 – Femmes : l’égalité ?

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Juillet-septembre 2011

Le dossier de ce trimestre dresse un panorama de l’état et des perspectives de l’égalité – toujours à reconquérir. Patricia Legouge et Roland Pfefferkorn soulignent combien le mouvement vers elle est partiel et contradictoire.

Du domaine le plus intime à la sphère publique, l’égalité est en question. Françoise Hurstel interroge la pertinence du lien automatique entre IVG et « échec » (de la contraception). La famille reste un enjeu majeur de l’égalité. Parfois dans la violence la plus crue, comme au Kurdistan, dont Nazand Begikhani analyse la tradition des crimes d’honneurs ; ou en France : Annick Houel montre que la notion de crime passionnel signe la hiérarchie des sexes, qui perdure malgré l’évolution des lois. Le plus banalement aussi dans la place implicite ou explicite réservée au femmes. Karima Messaoudi livre à ce sujet un témoignage percutant sur l’Algérie et Gérard Neyral montre comment, en France, nombre de femmes cumulent le poids des précarités familiales, financières et professionnelles.

Yvonne Knibiehler interroge la place donnée à la maternité dans les démocraties. Place gagnée, notamment avec le féminisme syndical décrit par Jocelyne George. Place en cours de conquête avec des progrès réels montrés par Rosa Maria Marques, Estela Capelas Barbosa et Ana Hutz à propos de l’Amérique latine.

Le travail quant à lui reste un haut lieu d’injustices, de la « double peine » (travail visible – travail invisible) que dénonce Marie Pezé aux inégalités salariales, contre lesquelles Rachel Silvera appelle à utiliser les nouveaux dispositifs légaux.

Sommaire

Femmes : l’égalité ?

  • Françoise Hurstel, Antoine Casanova, Femmes : l’égalité toujours à conquérir
  • Yvonne KnibiehlerLa maternité en démocratie
    La définition de la démocratie, expérience politique masculine, a longtemps ignoré la maternité, expérience féminine qui semblait relever de la vie privée. Mais l’accès des femmes à la citoyenneté, puis à la liberté de procréer, a changé la donne. Celle qui choisit d’être mère impose délibérément la vie à « l’enfant désiré ». Elle doit « élever » (au sens le plus fort du terme) un futur citoyen, et aussi veiller à l’aménagement du monde dans lequel il grandira. C’est à la fois comme sujet femme et comme sujet mère qu’elle doit participer à la vie politique en démocratie.
  • Jocelyne GeorgeLes travailleuses et le féminisme (1945-1979)
    Entre 1945 et 1979 se manifeste un féminisme syndical dont la place et la force ne sont pas reconnues. Les femmes de la CGT furent les premières, les plus claires, les plus résolues dans la lutte pour la reconnaissance de leur place dans le travail et dans leur organisation. Celles de la CFDT subirent longtemps les réticences liées à l’origine catholique de leur centrale puis rejoignirent les autres mouvements féministes. CGT et CFDT se retrouvèrent en 1979 dans la lutte pour la liberté de l’avortement, considérée désormais comme une nouvelle liberté sociale.
  • Françoise HurstelL’IVG chez les adolescentes, échec de la contraception ?
    Le fil rouge qui guide l’auteure dans cette recher­che sur la demande d’IVG par des mineures, est l’hypothèse d’une information sexuelle et d’une prévention qui, telles qu’elles sont actuellement conçues, reposent sur des « malentendus » – au sens où quelque chose n’est pas entendu donc pas pris en compte de ce qui est en jeu pour une adolescente dans son rapport au sexuel et dans son rapport à la maternité. Ces « malentendus » prennent la forme d’ambivalences à l’égard de la contraception et de l’IVG et sont repérables à trois niveaux, celui des jeunes filles, celui des accom­pagnants, celui des politiques. Ces ambivalences sont-elles dépassables et comment les dépasser ?
  • Karima Messaoudi, On ne naît pas Kahina, on le devient
    En Algérie, certaines femmes ont de longue date eu des prérogatives que l’histoire leur a accor­dées, telle la figure mythique de la Kahina. La question de la femme a été au cœur des enjeux politiques de ce pays depuis l’indépendance et a fait l’objet de nombreuses études académiques. À travers un récit autobiographique, cet article traite de cette question qui mérite qu’on y répon­de pour tenter d’y voir plus clair et comprendre ce qui se joue véritablement autour de la place de la femme et de la question taboue de la lutte des sexes dans la famille patriarcale.
  • Nazand BegikhaniCrimes d’honneur et stratégies de prévention au Kurdistan
    Le crime d’honneur, moralement et socialement accepté, est enraciné dans une tradition patriar­cale et profondément attachée au corps et à la sexualité de la femme. Au Kurdistan, les autres facteurs de cette violence sont : la culture et les valeurs tribales, la militarisation de la société et la culture de violence héritées des guerres successi­ves. S’y ajoute la technologie informatique utilisée sans le changement nécessaire des mentalités. Des centaines d’organisations de femmes se battent pour la défense de leurs droits et mènent des campagnes contres les crimes d’honneur.

    Le cours des idées

  • Gérard NeyrandLes multiples visages de la précarité féminine
    Le processus de démocratisation des relations privées, en favorisant la prise d’autonomie des femmes, a participé à une fragilisation relation­nelle, mettant en péril l’existence d’un nombre croissant de couples. Les séparations vont tou­cher plus durement les femmes de milieux popu­laires, amenées à élever seules leurs enfants bien souvent dans une grande précarité. La précarité relationnelle génère ainsi une précarité qui n’est pas seulement économique mais aussi sociale et psychologique, que la logique néolibérale contribue à exacerber. Y répondre efficacement nécessite de prendre en compte conjointement ces différentes formes de précarité.
  • Annick HouelCrime dit passionnel et inéga­lités de sexe
    Une analyse du fait divers passionnel, unanime­ment méprisé mais largement lu, fournit une image caricaturale mais éclairante des représen­tations sociales de la famille, du couple et de la hiérarchie entre les sexes et montre combien ces représentations perdurent dans notre so­ciété française malgré l’évolution des lois. Elles imprègnent également les cours d’assises, par le biais entre autres des expertises psychiatriques, et amènent à des jugements différenciés selon le sexe de l’auteur du crime.
  • Patricia Legouge, Roland PfefferkornInégalités hommes-femmes : avancées et obstacles
    Malgré les transformations des rapports sociaux de sexe, des inégalités persistent dans de nom­breux domaines. Les femmes sont davantage tou­chées par la précarisation du marché du travail et la dégradation des conditions d’emploi. L’accès à certains postes ou à des niveaux hiérarchiques élevés reste difficile. Celles qui sont affectées à la prise en charge des personnes dépendantes sont de plus en plus souvent des migrantes venues de pays pauvres. L’inégale répartition des tâches domestiques concourt toujours aux discriminations à l’emploi. Les violences faites aux femmes demeurent les manifestations les plus brutales des inégalités entre hommes et femmes. Le mouvement vers une égalité réelle est partiel et contradictoire.

    Confrontations

  • Marie PezéFemmes au travail, la double peine 
    Quelles places les exigences de l’identité sociale au travail laissent-elles à la construction du mas­culin et du féminin ? Le monde du travail est tra­versé par les rapports sociaux de sexe, définissant des conduites et des représentations du monde qui ne sont pas sexuelles au sens psychanalytique du terme. Si les hommes peuvent s’approprier les tâches à responsabilité qui impliquent une forte biodisponibilité, il faut rappeler que la per­formance masculine n’est souvent obtenue que grâce au soutien du corps masculin par les fem­mes. La capacité de travail des hommes est donc soutenue par le travail corporel des femmes, travail invisible, qui va de soi et dont le don doit être fait avec le sourire. Outre la discrimination salariale à l’embauche, la discrimination dans les affectations, l’assignation à la sous-traitance de la sphère privée, les femmes, athlètes du quotidien, se voient donc privées de la reconnaissance de leurs savoir-faire invisibles.
  • Rachel SilveraInégalités salariales : nouveau film en 3 D
    Dès l’entrée sur le marché du travail, tout au long de la carrière, les discriminations de sexe jouent. La ségrégation professionnelle n’est pas une donnée exogène au marché du travail, mais le fruit de stéréotypes de genre. En mai et juillet 2010, deux décisions de justice ont donné raison à des femmes pour discrimination salariale. Les inégalités salariales ne sont pas inéluctables. Des leviers d’ac­tion existent, comme celui du recours judiciaire, qui devraient être relayés collectivement, notamment par les organisation syndicales, mais également par des directions de ressources humaines.
  • Rosa Maria Marques, Estela Capelas Barbosa, Ana HutzLa femme en Amérique latine et aux Caraïbes
    Cet article discute l’insertion de la femme des sociétés de l’Amérique latine et des Caraïbes, dans leurs environnements de travail, dans les familles et dans les communautés, pour la pé­riode 1990-2010. Sont analysées les tendances démographiques, celles du marché de travail, la violence et la participation féminine au pouvoir législatif. Bien que la situation de la femme se soit améliorée dans les deux dernières décennies, elle reste inacceptable étant donné le niveau d’inégalité qui persiste.

Vie de la recherche

  • Hervé Polesi, Rapports sociaux de sexes et santé des femmes au travail

    revue des revues

  • Patrick Coulon, Au féminin pluriel

    Documents

  • Marta Dillon, Argentine : le cauchemar des hommes violents
  • Paroles de femmes des campagnes corses
  • Yvonne Knibiehler, La maternité à l’épreuve du genre

    Livres

  • Comptes rendus par Sandra Baumlin, Hervé Polesi, Jocelyne George, Roland Weyl, Anne Thévenot, Jean Broussal, Jean Magniadas, Fabien Maury, Patrick Ribau
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