Juillet-septembre 2010.
En 2007, le quatrième rapport du Giec tend à rendre l’Homme responsable des changements climatiques perceptibles de notre planète. Le dossier de La Pensée de ce trimestre met en perspective l’état du débat, parfois irrationnel comme le montre Patrick Ribaud grâce à l’étude récente sur les paléoclimats et l’antériorité des changements climatiques à la présence de l’Homme. Mais le développement actuel, accompagné, rappelleJean-Paul Deléage, de guerres et de conflits pour les ressources de la planète, est une menace urgente et réelle sur l’environnement planétaire.
Coincé entre capitalisme vert et anti-productivisme, le débat est par trop amputé de la question de la place de l’homme et de son mieux-être. Il y a pourtant, souligne Alain Obadia, urgence à penser un nouveau mode de développement, qu’il faudrait, pour Frédéric Boccara, débarrasser des oripeaux des analyses économiques néo-classiques. Ainsi Laurent Etre propose de replacer la question du travail vivant comme socle de la réflexion. Sur un autre plan, Jean-Luc Guichet interroge deux notions émergentes, notamment dans le monde anglo-saxon : « éthique environnementale » ou « éthique animale ». L’une ayant pour centre la nature, l’autre les individus.
Et si l’Écosocialisme, selon la thèse de Frei Betto et Michael Löwy,était une réponse novatrice à ces enjeux, mariant les idées fondamentales du socialisme et les avancées de la critique écologique ?
Sommaire
Dossier : Environnement
- Patrick Ribau, De l’irrationalisme appliqué au climat
En 2007, le 4e rapport du GIEC tend à rendre l’Homme seul responsable des changements climatiques perceptibles de notre planète. Si celui-ci peut, certes, accélérer des processus en cours par l’émission de gaz à effet de serre, bien d’autres paramètres peuvent expliquer l’augmentation de la quantité de CO2 dans l’atmosphère comme l’étude scientifique des paléoclimats tend à le démontrer pour une époque où l’Homme était peu présent voire totalement absent sur notre planète. - Jean-Paul Deléage, Conflits pour les ressources dans la mondialisation
Les guerres et les conflits pour les ressources ravagent la planète et constituent l’un des visages les plus hideux de la mondialisation contemporaine. Après un rappel des violences anciennes pour le contrôle de la rente minière, sera abordée une nouvelle dimension de ces conflits, traitée sous l’angle de la mainmise sur des « biens communs » tels que le climat, la biodiversité, et de l’accaparement de terres agricoles, au cœur de conflits émergents nés le l’expansion capitaliste mondiale dans un monde fini. Enfin, il sera montré en quoi les guerres dites locales pour les ressources redessinent les territoires de la mondialisation et des luttes de classes associées à cette dernière. - Alain Obadia, Un enjeu de civilisation
S’engager dans un nouveau mode de développement est une tâche urgente pour l’humanité. Il faut impérativement conjuguer l’ensemble des dimensions qui déterminent le progrès humain. Le social fondé sur une démarche de réponse aux besoins des personnes et de la société, l’économique dans une conception profondément renouvelée qui le place au service des objectifs sociaux, l’écologie qui est une condition majeure de la durabilité des progrès accomplis, la démocratie la plus poussée garante de l’ancrage populaire de la démarche. C’est un projet politique transformateur, un enjeu de civilisation. - Laurent Etre, Ambiguïtés du rapport de l’écologie au travail
D’un côté, des adeptes de la croissance verte, soluble dans le capitalisme mondialisé ; de l’autre, des anti-productivistes… Ces oppositions internes de l’écologie politique n’effacent pas une vision du monde cohérente, dont le cœur est un rapport négatif au travail productif. Peut-on vraiment interroger les fnalités de la production, notamment en fonction de critères écologiques, sans partir de la revalorisation du travail vivant ? En subsumant les rapports sociaux de production sous le rapport homme/nature, les approches écologistes ont toujours plus ou moins tendance à propager une peur du progrès en soi. Celle-ci les met en contradiction avec leurs prétentions démocratiques et peut les rendre complice de la reproduction des inégalités de classe. - Frédéric Boccara, Économie et écologie, où en est-on ?
Cet article est une approche critique des analyses théoriques dominantes qui sous-tendent les dispositifs économiques mis en œuvre face à la crise écologique. Ces analyses d’inspiration néo-classique tirent partie de l’apparence de réalisme que leur donnent la formalisation et la quantifcation.
Le cours des idées
- Jean-Luc Guichet, Environnementale ou animale ? Deux éthiques contemporaines
Récemment, deux éthiques appliquées se sont fortement développées dans le monde anglo-saxon : l’« éthique environnementale » et l’« éthique animale ». Souvent confondues, ces deux conceptions sont pourtant très différentes voire opposées, inversant même leurs fondements : que devons mettre au centre de notre souci éthique, les individus ou l’ensemble de la nature ? L’article s’interroge sur ce conflit et sur la possibilité de le réduire ou au contraire de l’approfondir jusqu’aux bases éthiques elles-mêmes.
Confrontations
- Frei Betto, Michael Löwy, Écosocialisme : spiritualité et soutenabilité
À la racine de la crise écologique actuelle se trouve une civilisation – le capitalisme occidental – fondée sur le consumérisme, le fétichisme de la marchandise et l’accumulation illimitée du profit. Sa logique d’expansion sans bornes s’est révélée incompatible avec la protection de la nature. L’écosocialisme est une tentative originale d’articuler les idées fondamentales du socialisme avec les avancées de la critique écologique. Son objectif est une nouvelle civilisation, un mode de vie alternatif, fondé sur des nouvelles valeurs sociales et éthiques.
Revue des revues
- Patrick Coulon, Des naissances, un arrêt… et un oubli !
Vie de la recherche
- Patrick Ribau, L’Algérie et l’eau
- François Houtart, Colombie – Notes de voyage (2-12 avril 2010)
Documents
- Jean Dresch, Géographie d’hier et d’aujourd’hui
- Klimaforum09, Changeons le système ! Pas le climat !
Livres
- Comptes rendus par Gérard le Puil, Pierre-Henri Lab, Jean Magniadas, Yves Vargas, Fabrice Pruvost, Daniel Bachet, Aymeric Monville, Paul Mazliak, James Cohen, Yves-Claude Lequin, René Mouriaux, Jacques Bénézit