Article paru dans Le Patriote à propos de la note Agricultures africaines et marché mondial (3 octobre 2008)
Un petit livre de 80 pages suivies de notes et de références nous en apprend plus que de longs discours sur un problème qui semblerait insoluble tant il est récurrent. Il s’agit d’ « Agricultures africaines et marché mondial », travail clair et précis de Marc Dufumier, agronome, professeur d’agriculture comparée, expert en développement agricole et rural dans diverses régions du sud de tous les continents, ici en Afrique subsaharienne. L’exposé est clair. D’abord, les conditions qui expliquent la faible compétitivité des agricultures africaines : sols pauvres en matières organiques et éléments minéraux ; pluies capricieuses qui troublent les saisons des semences. A l’époque pré-coloniale, agriculteurs et éleveurs associaient leurs ressources et parvenaient à vivre en respectant les coutumes culturales. Arrive la colonisation avec la constitution de tenures de plus en plus vastes aux dépens des paysans dépossédés qui deviennent une main d’œuvre semi-asservie. Les cultures vivrières laissent la place aux produits destinés à l’exportation : café, cacao, coton, arachide…
Les conditions socio-économiques sont bouleversées. Les Etats devenus indépendants préfèrent la rentrée de devises à la sécurité alimentaire des citoyens. Le comportement de ces gouvernants qui s’accaparent des sommes considérables, souvent des aides étrangères, contribue à paupériser les paysans. Parfois surgit une idée qui paraît salvatrice : réaliser de grands aménagements hydro-agricoles. Le résultat est décourageant, les régions éloignées des fleuves ne pouvant pas en bénéficier et l’entretien exigeant des fonds difficiles à trouver.
Alors, faut-il baisser les bras ? Non ! On doit -et on peut- réformer la politique agricole commune européenne, protéger les cultures vivrières de l’Afrique subsaharienne, développer le commerce équitable. Pourquoi ne pas instaurer des droits de douane sur les produits du Nord alors que les paysans africains ne peuvent pas bénéficier de cette aide pour leurs propres ventes ? Une hausse de leurs produits leur permettrait de vivre sans connaître les affres de l’émigration.
Démocratiser et sécuriser l’accès au foncier agricole. Ne pas appliquer dans chacun des pays des réglementations uniformes qui risquent d’être inadaptées et de provoquer des conflits. Améliorer un rendement n’est pas synonyme d’accroître. Les paysans savent ce qu’il faut semer et quand il convient de le faire . C’est donc en cela qu’il faut les aider et retrouver l’alliance d’autrefois entre agriculteur et éleveur, l’un et l’autre se complétant.
Déjà, dans la plupart des pays africains, existent des organisations paysannes, professionnelles ou syndicales. Que l’Organisation Mondiale du Commerce en tienne compte pour fixer ses règles, ainsi que du savoir-faire et des nécessités des paysans.
Marie Laïlle