Saison 2018-2019
Débats autour de grands enjeux européens.
Cette saison a compté 7 séances dont deux « hors cycle » : Urgence: climat! et Algérie, comment en est-on arrivé là?. Les vidéos des interventions des séances précédentes sont consultables dans les onglets de la séance correspondante.
Séances
Agriculture et écologie : comment changer le modèle agricole européen ?
Séance du 17 avril 2019 avec Aurélie Catallo, Aurélie Trouvé et Gilles Luneau
La politique agricole commune (PAC) est organisée aujourd’hui autour de deux piliers : d’une part le soutien aux prix et aux revenus des producteurs et d’autre part un accompagnement du « développement rural ». Prise dans son intégralité, cette PAC représente, avec 52 milliards d’euros par an soit 38% du total, le poste de dépenses le plus important du budget de l’Union européenne. Créée pour encourager la production agricole, la PAC a longtemps été protectionniste. A partir des années 90, avec l’adhésion de l’UE à l’OMC, elle se conforme peu à peu aux impératifs néolibéraux du libre-échange international et a été privée de ses outils les plus régulationnistes.
La PAC a accompagné l’essor d’un modèle agricole conventionnel intensif qui repose sur une forte mécanisation (et bientôt robotisation) et un usage abondant de produits de l’industrie agrochimique. Ce modèle est socialement dévastateur pour les producteurs agricoles : chute de l’emploi dans le secteur, revenus instables et en baisse, risques sanitaires, forte dépendance à l’industrie agroalimentaire et à la grande distribution… Il est aussi à l’origine de dégâts environnementaux considérables : dégradation des sols, des ressources en eau, de la biodiversité et mauvaise empreinte carbone du fait du transport des produits sur de longues distances. Enfin, en permettant d’exporter des produits subventionnés, la PAC déstabilise les marchés alimentaires des pays du Sud.
Alors que l’UE est en train de préparer une révision générale de la PAC pour la période 2021-2027, comment concevoir une politique qui puisse accompagner une transition du système agricole vers l’agroécologie ? Le chantier est immense pour arriver à une agriculture socialement juste qui ne dégrade pas notre environnement et notre santé. Un modèle paysan libéré des intrants chimiques, qui développe des emplois en milieu rural, favorise les circuits courts, la désindustrialisation de l’alimentation, et qui ne concurrence plus les paysans du Sud chez eux, doit être encouragé. Quelles sont les voies pour y parvenir ?
Avec :
- Aurélie Catallo, coordinatrice de la plateforme Pour une Autre PAC.
- Aurélie Trouvé, agronome et économiste. Porte-parole d’Attac France. Elle est l’auteure de l’ouvrage « Le Business est dans le pré » (Fayard, 2015) et coauteure de « Cette Europe malade du néolibéralisme » (Attac/Fondation Copernic, Les liens qui libèrent, mars 2019).
Débat animé par Gilles Luneau, écrivain, réalisateur et journaliste ; spécialiste des questions agricoles, agroalimentaires et climatiques. Il est rédacteur en chef de Global Magazine.
La gauche et l'Europe
Séance du 27 mars 2019 avec Louis Weber et Anne Le Huerou
Le terme de gauche recouvre en Europe une réalité tout aussi complexe qu’en France. Historiquement, la social-démocratie a été, avec les chrétiens-démocrates, à l’origine de la construction européenne actuelle et de ses évolutions, du traité de Rome et de l’Europe des Six jusqu’à la dérive néolibérale de ces dernières années. Pendant longtemps, ces deux courants ont été les seuls à s’organiser véritablement au niveau européen, selon diverses modalités.
La gauche dite « radicale » est en revanche plus composite. Elle rassemble en effet des partis qui, après avoir pendant longtemps refusé la construction européenne, en contestent aujourd’hui les orientations en préconisant une « autre Europe » et des partis, notamment dans les pays scandinaves, ayant milité contre l’adhésion de leurs pays à l’Union européenne et continuant avec plus ou moins de constance à la refuser. Logiquement, certains de ces partis ont davantage hésité et continuent à hésiter à s’organiser au niveau européen. De leur côté, les Verts, apparus plus tardivement dans l’espace politique, ont d’emblée opté pour une organisation plus forte au niveau européen et restent les seuls à se présenter aux élections européennes sur une base commune à tous les pays.
Enfin, le retour sur la scène politique de forces nationalistes et rétrogrades, accédant de plus en plus aux responsabilités gouvernementale nationales, s’est appuyé sur la contestation de plus en plus forte de l’Europe actuelle. Ce qui a profondément changé les rapports de force au niveau national, au détriment principalement mais pas seulement des conservateurs ou des coalitions qu’ils dirigent.
Quelle est aujourd’hui, à quelques semaines des élections européennes, la situation de la gauche dans les divers pays européens ? Quelles sont les alliances en cours de constitution ? Quelle est la tendance, s’il en existe une, des sondages d’opinion ? Quelles sont les perspectives pour une conception « de gauche » de l’Union européenne, par ailleurs déstabilisée par le Brexit ?
Avec Louis Weber, éditeur, co-auteur de « La gauche radicale en Europe »
Débat animé par Anne Le Huerou, maîtresse de conférences à l’Université Paris Nanterre ; Assemblée européenne des citoyens AEC/IPAM.
Quelles politiques de défense en Europe?
Séance du 12 décembre 2018 avec Claude Serfati, Bernard Dreano et Iris Muraz
Armée européenne ? Initiative d’intervention européenne ? Autonomie stratégique européenne ? De quelle défense parle-t-on, face à quelle menace, et pour quelle Europe, ou faudrait-il dire quelles Europes ?
Pendant la période de guerre froide, la « défense en Europe (de l’ouest)» c’était d’abord, face à la « menace » soviétique, l’Alliance Atlantique sous contrôle politique et stratégique américain, les modes opératoires et doctrines d’engagement (y compris intérieur) de l’OTAN, la domination industrielle américaine en matière d’équipement… et la place particulière de la France gaullienne et post-gaullienne avec sa force de frappe nucléaire, qui sans remettre en cause cette architecture atlantiste, a joué son propre « avantage compétitif » politique et industriel en Europe.
La fin de l’affrontement des blocs après 1989-1992 et les nouvelles menaces n’ont pas remis en cause fondamentalement cette situation. Et la nouvelle course aux armements, y compris nucléaires, l’accumulation des contentieux russo-européens en Europe de l’est, semble même la remettre en selle.
Pourtant le monde a changé. Les rivalités mondiales et conflits régionaux ne sont plus les mêmes. L’Europe s’est élargie, mais elle est en crise profonde, y compris sur le plan stratégique et militaire. Les relations euro-américaines se sont gravement dégradées avec Trump. Les appareils militaires et les doctrines d’emploi semblent inefficaces face aux crises concrètes. Contrairement aux espérances de la fin du XXe siècle aucun système de coopération et de sécurité collective ne s’est développé entre l’Europe et sa périphérie, tandis que sont remis en cause les concepts issus de la période précédente.
Avec:
- Claude Serfati, économiste et chercheur (Institut de recherches économiques et sociales et CEMOTEV université de Versailles St. Quentin, membre du conseil scientifique d’ATTAC, auteur de Le militaire, une histoire française, Editions Amsterdam 2017.
- Bernard Dreano, président du centre d’études et d’initiative de solidarité internationale CEDETIM et membre de l’Assemblée européenne des citoyens (HCA-France), auteur (dir.) de (In)sécurité humaine, les luttes pour la paix au XXIe siècle, Editions Non-Lieu, 2015.
Débat animé par Iris Muraz, doctorante en sociologie à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociale (EHESS) à Paris, rattachée au laboratoire du Centre d’études des mondes russe, caucasien et centre européen (CERCEC)
L’euro : un carcan pour les peuples?
Séance du 7 novembre 2018 avec Pierre Khalfa, Denis Durand et Chrystel Le Moing.
La mise en place de l’Union économique et monétaire, avec une monnaie unique l’euro et une banque centrale déclarée indépendante, a contribué à instaurer la mainmise des marchés financiers mondialisés sur les gestions d’entreprises et sur les politiques économiques. En l’absence d’harmonisation sociale et fiscale, la mise en concurrence des systèmes sociaux des Etats membres sans aucun mécanisme de solidarité entre les pays a abouti à un éclatement des trajectoires économiques entre les Etats membres de l’Union et à une crise profonde de la construction européenne. Comment sortir de cette situation ? Quelle stratégie mettre en œuvre pour briser ce carcan ?
Avec
- Pierre Khalfa, économiste, membre de la Fondation Copernic;
- Denis Durand, économiste, ancien directeur-adjoint à la banque de France;
Le débat a été animé par Chrystel Le Moing, chargée de mission aux relations internationales (fondation Gabriel Péri).
L’euro : un carcan pour les peuples? – Pierre Khalfa
L’euro : un carcan pour les peuples? – Denis Durand
L’euro : un carcan pour les peuples? coordination Chrystel Le Moing
L’euro : un carcan pour les peuples? – Débat avec Pierre Khalfa et Denis Durand
Europe et immigration, quelles réponses ?
La séance du mercredi 3 octobre 2018.
La question de l’immigration taraude les sociétés européennes. Loin de l’Europe des valeurs dont les gouvernements et les instances européennes se gargarisent en d’autres occasions, l’absence de solidarité avec les pays que leur situation géographique met en première ligne (la Grèce, l’Italie, Malte, aujourd’hui l’Espagne) multiplie les situations dramatiques. L’extrême droite et plus généralement les partis conservateurs en tirent profit et contribuent à les entretenir. L’exemple récent de l’Allemagne montre que cette question travaille aussi une partie de la gauche.
Comment dans ce contexte agir en France et en Europe en faveur de politiques de l’asile ouvertes et humanistes ? Pour mettre fin à la distinction arbitraire entre immigration économique et immigration politique ? Pour rappeler les responsabilités passées et actuelles des pays développés dans un ordre mondial profondément inégalitaire, qui fait apparaître l’émigration comme la seule solution dans les pays d’origine des migrants ? Pour des politiques économiques et écologiques susceptibles d’en finir avec les situations de guerre mais aussi les déséquilibres et désordres climatiques directement à l’origine de beaucoup de migrations ?
Avec
- Danièle Lochak, juriste, professeure émérite de droit public à l’université Paris-Nanterre et militante associative de la défense des droits de l’homme, ancienne présidente du GISTI ;
- Catherine Wihtol de Wenden, juriste, politiste, docteur en science politique de Sciences Po;
Le débat a été animé par Louis Weber, ancien syndicaliste, éditeur
Europe et immigration : quelles réponses ? Louis Weber from Institut Tribune Socialiste on Vimeo.
Europe et immigration : quelles réponses ? avec Daniele Lochak from Institut Tribune Socialiste on Vimeo.
Europe et immigration : quelles réponses ? avec Catherine Wihtol de Wenden from Institut Tribune Socialiste on Vimeo.
Europe et immigration : quelles réponses ? Débat avec Daniele Lochak et Catherine Wihtol de Wenden from Institut Tribune Socialiste on Vimeo.
Séances hors cycle
Urgence climat !
Séance du 20 février 2019 avec Maxime Combes, Valérie Masson-Delmotte et Benoit Monange.
En 2015, l’Accord de Paris avait suscité l’espoir d’un véritable démarrage des politiques climatiques de dimension internationale, même s’il y avait encore de bonnes raisons de se garder d’un excès de confiance. Il avait été accompagné pour la première fois en France d’une mobilisation populaire, notamment de jeunes, sortant des mobilisations politiques traditionnelles.
Trois ans après, les paradoxes s’accumulent. D’un côté, le retrait des Etats-Unis s’ajoute aux trahisons grandes et petites des pays industrialisés, dont la France. Conséquence : alors que l’objectif minimal aurait été de limiter le réchauffement à la fin du siècle à +2°, c’est plutôt vers +3° que l’on s’achemine.
A l’opposé, le dernier rapport « spécial » du GIEC révèle l’ampleur du différentiel de risques encourus en tous genres de ce fait. Il n’hésite pas à déborder sur le champ politique en recommandant des transitions systémiques incluant par exemple, dans leurs objectifs, non seulement la lutte contre la pauvreté, mais aussi la réduction des inégalités. Il met en outre l’accent sur les conséquences incalculables qui résulteraient d’un dépassement de la cible. De nombreux scientifiques dénoncent le risque de « basculement systémique » non datable car sans précédent historique, qui exige d’autant plus d’exclure tout retard dans l’exécution du scénario à +1,5 °.
Ces changements du paradigme du climat posent de façon encore plus aigüe les questions de renouvellement des politiques nationales. Il s’agit d’ouvrir un débat de société. Deux faits récents peuvent nous y encourager : le succès de la pétition « L’affaire du siècle » qui a dépassé les 2 millions de signatures ; la manière dont le mouvement des gilets jaunes a évité de tomber dans le climato- négationnisme malgré son déclenchement dû à une politique aussi technocratique qu’imbécile.
Avec:
- Maxime Combes, économiste, militant d’Attac France, où il suit les grands enjeux environnementaux et énergétiques nationaux et mondiaux.
- Valérie Masson-Delmotte, paléoclimatologue, directrice de recherche au CEA et co-présidente du groupe nᵒ 1 du GIEC.
Débat animé par Benoit Monange, directeur de la Fondation de l’Ecologie politique.
Algérie, comment en est-on arrivé là?
Séance du 15 mai 2019, avec Jean-Baptiste RIVOIRE et Omar BENDERRA au CICP (21 ter rue Voltaire, 75011 Paris)
L’extraordinaire mobilisation pacifique qui a soulevé la population algérienne depuis le 22 février 2019 a surpris tous les observateurs. Elle a profondément ébranlé un pouvoir militaire d’essence dictatoriale et fissuré sans doute définitivement sa façade pseudo-démocratique.
Pour comprendre les spécificités de ce mouvement absolument hors norme dans l’histoire contemporaine et envisager ses évolutions possibles, il est essentiel de revenir sur l’histoire de l’Algérie indépendante, en particulier sur le rôle très singulier joué par les relations complexes entre ce pays et l’ancienne puissance coloniale.
C’est ce qu’évoqueront les deux intervenants, qui analyseront également les ressorts profonds d’un système de pouvoir marqué par la corruption généralisée. Et qui reviendront sur les formes de la mobilisation populaire, caractérisée par une lucidité aiguë quant à la nature du pouvoir et les périls qui guettent aujourd’hui la société algérienne.
Cette initiative participe de la volonté de populariser les aspirations des manifestant.e.s algérien.e.s et d’encourager une solidarité active avec le peuple algérien.
- Jean- Baptiste RIVOIRE, journaliste et syndicaliste, co-auteur de « Francalgérie, crimes et mensonges d’états »
- Omar BENDERRA, économiste, membre d’Algéria Watch/
Le débat