Rencontre avec Pierre Ivorra autour de son livre (28 janvier 2015)
Les marchés financiers, on croit les connaître. Certes, on les côtoie mais sans toujours s’en rendre compte. Sait-on réellement ce qu’ils sont ? Mesure-t-on leur pouvoir ? Aujourd’hui, la masse de capitaux investis à la Bourse s’élève dans le monde à plus de 60 000 milliards de dollars. Ce n’est pourtant que le sommet de l’iceberg financier. Les marchés financiers sont la forme contemporaine de ce qu’Alexandre Dumas fils appelait « les affaires » et qu’il définissait comme « l’argent des autres ». Des « autres », mais de qui ? De vous, de nous, indirectement. Le crédit des banques s’appuie en effet à la fois sur leur capacité à créer de la monnaie et sur les dépôts de leurs clients. Mais aujourd’hui ces derniers, dans leur masse sont des salariés. Leur argent, leur paie, leurs économies, les richesse qu’ils produisent servent à financer l’activité et pour autant ils n’ont aucun droit, aucun pouvoir sur l’utilisation de cet argent.
Avec le développement de la finance, avec aussi celui de la nouvelle révolution technologique en cours, ce dessaisissement est encore plus radical et aussi plus destructeur pour le monde du travail, pour l’ensemble de la société, pour l’humanité et son environnement naturel. Pour éviter le désastre vers lequel nous glissons, il ne s’agit pas seulement pour le peuple travailleur de s’approprier ce droit à la gestion de l’argent mais aussi de gérer celui-ci autrement, avec d’autres critères que ceux de la rentabilité financière, afin notamment de maîtriser les innovations technologiques, les transformations sociétales et écologiques.
A l’opposé des chantres de « la concurrence libre et non faussée » et de ceux prônant un repli faussement identitaire mais réellement destructeur, l’ouvrage se prononce pour une réorientation de la construction européenne, de la gestion de l’euro et de la Banque centrale européenne, les peuples n’ayant pas d’autre choix pour se tirer des griffes de la finance et du roi dollar que de coopérer, de transformer les critères du crédit et ceux à l’œuvre au sein même des entreprises. C’est le seul chemin possible pour éradiquer le chômage et entamer une transition écologique de progrès.
Ce livre est un appel au partage et à l’action pour qu’adviennent enfin des jours heureux.
La finance au pas. Ce qu’il faut savoir sur la finance pour mieux la combattre. Édition du Temps des cerises, Collection Penser le monde, ISBN : 9782370710130, 376 pages, 22 euros.
Pierre Ivorra est chroniqueur économique à L’Humanité. Journaliste à L’Humanité Dimanche et à L’Humanité, de 1978 à 1998, puis à nouveau à partir de 2008, il a réalisé de nombreuses enquêtes, dirigé la rubrique politique économique et sociale de L’Humanité Dimanche puis la rubrique économie et luttes du quotidien. En 1998, il quitte le journal et devient analyste financier dans différents cabinets. À cette occasion il réalise des missions dans de grands groupes comme Total, Vinci, Canal +, Nestlé… puis se spécialise dans l’expertise d’entreprises de presse, journaux, sociétés de distribution, imprimeries. Il est ainsi missionné à l’AFP, chez France Soir, Libération, à La Tribune, à l’INA, chez Arte, …. En 2008, à l’occasion de la crise financière, il collabore à nouveau à L’Humanité, notamment en rédigeant une chronique économique hebdomadaire. Il a par ailleurs écrit plusieurs ouvrages : « Sur la piste des grandes fortunes », « Sur la piste des patrons », en collaboration avec Jack Dion, et « Face à la crise des clés pour comprendre », aux éditions de l’Humanité.