Le 6 avril 1871, la Commune de Paris rédige une proclamation à destination des autres départements pour démentir les accusations portées contre les communards par le gouvernement de Versailles et expliquer les véritables leurs intentions. Dans la partie non officielle, le Comité central rappelle la nature de son mandat afin, ici aussi, de démentir les fausses allégations portées contre ses membres.
Journal officiel de la Commune de Paris, Vendredi 7 avril 1871.
Paris, le 6 Avril 1871.
LA COMMUNE DE PARIS
AUX DÉPARTEMENTS
Vous avez soif de vérité, et, jusqu’à présent, le gouvernement de Versailles ne vous a nourris que de mensonges et de calomnies. Nous allons donc vous faire connaître la situation dans toute son exactitude.
C’est le gouvernement de Versailles qui a commencé la guerre civile en égorgeant nos avant-postes ; trompés par l’apparence pacifiques de ses sicaires ; c’est aussi ce gouvernement de Versailles qui fait assassiner nos prisonniers, et qui menace Paris des horreurs de la famine et d’un siège, sans souci des intérêts et des souffrances d’une population déjà éprouvée par cinq mois d’investissement. Nous ne parlerons pas de l’interruption du service des postes, si préjudiciable au commerce, de l’accaparement des produits de l’octroi, etc., etc.
Ce qui nous préoccupe avant tout, c’est la propagande infâme organisée dans les départements par le gouvernement de Versailles pour noircir le mouvement sublime de la population parisienne. On vous trompe, frères, en vous disant que Paris veut gouverner la France et exercer une dictature qui serait la négation de la souveraineté nationale. On vous trompe, lorsqu’on vous dit que le vol et l’assassinat s’étalent publiquement dans Paris. Jamais nos rues n’ont été plus tranquilles. Depuis trois semaines, pas un vol n’a été commis, pas une tentative d’assassinat ne s’est produite.
Paris n’aspire qu’à fonder la République et à conquérir ses franchises communales, heureux de fournir un exemple aux autres communes de France.
Si la Commune de Paris est sortie du cercle de ses attributions normales, c’est à son grand regret, c’est pour répondre à l’état de guerre provoqué par le gouvernement de Versailles. Paris n’aspire qu’à se renfermer dans son autonomie, plein de respect pour les droits égaux des autres communes de France.
Quant aux membres de la Commune, ils n’ont d’autre ambition que de voir arriver le jour où Paris, délivré des royalistes qui le menacent, pourra procéder à de nouvelles élections.
Encore une fois, frères, ne vous laissez pas prendre aux monstrueuses inventions des royalistes de Versailles. Songez que c’est pour vous autant que pour lui que Paris lutte et combat en ce moment. Que vos efforts se joignent aux nôtres, et nous vaincrons, car nous représentons le droit et la justice, c’est-à-dire le bonheur de tous par tous, la liberté pour tous et pour chacun sous les auspices d’une solidarité volontaire et féconde.
Paris, le 6 avril 1871.
La commission exécutive :
COURNET, DELESCLUZE, FÉLIX PYAT, TRIDON, VAILLANT, VERMOREL
L’opinion d’une certaine partie de la population, manifestée par plusieurs journaux, nous attribue une situation sur laquelle il est de notre devoir de nous expliquer, ne serait-ce que pour donner une dernière garantie de notre bonne foi.
Ainsi que nous l’avons déjà déclaré, notre mandat politique expirait le jour où, tenant loyalement notre parole, nous remettions entièrement et sans restriction entre les mains des membres de la Commune des pouvoirs que nous n’avions exercés, pour notre compte, qu’à titre pour ainsi dire administratif.
N’ayant pas cru devoir nous ériger en gouvernement lorsque nous supportions seuls la lourde charge de tout créer, après le chaos dans lequel la fuite à Versailles laissait Paris, il n’est pas à supposer que nous prétendions maintenant réclamer une part de pouvoir à la Commune que nous avons contribué à établir.
Notre passage à l’Hôtel-de-Ville, la sympathie qui nous y a accompagnés, et l’approbation qui a accueilli chacune de nos paroles, chacun de nos actes, ne nous ont pas un seul instant fait perdre de vue le rôle d’où nous étions sortis par la force des choses par la force des choses et dans lequel nous devions rentrer complètement et sans arrière-pensée.
Nous le déclarons donc une dernière fois : nous n’avons voulu et ne voulons aucun pouvoir politique, car une idée de partage serait un germe de guerre civile dans nos murs, venant compliquer celle que des frères dénaturés, par ignorance et par les mensonges d’ambitieux, nous apportent avec une horrible haine.
Nous sommes redevenus, le 28 mars, ce que nos mandats nous ont faits, ce que nous étions le 17 ;
Un lien fraternel entre tous les membres de la garde citoyenne; une sentinelle avancée et armée contre les misérables qui voudraient jeter la désunion dans nos rangs ; une sorte de grand conseil de famille veillant au maintien des droits, à l’accomplissement des devoirs, établissant l’organisation complète de la garde nationale, et prêts, à chaque heure, à dire à ceux qui nous ont élus :
Jugez. Etes-vous contents de nous ? Voilà quelle est notre ambition. Elle se borne aux limites de notre mandat, et nous la trouvons assez haute pour l’avoir l’orgueil de n’en jamais sortir.
Vive la République ! Vive la Commune !
Paris, le 5 avril 1871.
Pour le Comité central,
G. ARNOULD, ANDIGNOUX, AUDOYNAUD,
AVOINE FILS, BAROUD, BOUIT, L. BOURSIER,
H. CHOUTEAU, A. DU CAMP, FAVRE, FERRAT,
FOUGERET, C. GAUDIER, GROLARD, GOUHIER,
GRELLIER, GUIRAL, LAVALLETTE, ED. MOREAU,
PRUDHOMME, ROUSSEAU.