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Par Léo Rosell. L’Assemblée consultative provisoire est l’Assemblée représentative de la France libre. Elle réunit les différents mouvements de la Résistance, les partis politiques et les syndicats opposés à la collaboration, sous l’autorité du Comité français de libération nationale (CFLN), qui devient, le 3 juin 1944, le Gouvernement provisoire de la République française (GPRF). 

Siégeant à Alger du 3 novembre 1943 au 25 juillet 1944, elle est transférée à Paris à la Libération, du 7 novembre 1944 au 3 août 1945. L’Assemblée consultative provisoire n’a pas l’initiative des lois. En revanche, elle constitue un lieu de délibération original où sont discutés les projets de la Résistance, elle interpelle le Gouvernement provisoire sur les questions qui l’intéressent et doit être consultée sur les projets d’ordonnances, à travers des demandes d’avis. Pour ce faire, elle se dote de commissions. Celle du Travail et des Affaires sociales est présidée, dès son installation à Paris en novembre 1944, par Ambroise Croizat. 

Concernant la Sécurité sociale justement, certaines mesures sont examinées par la commission du Travail et des Affaires sociales dès décembre 1944. Son président, Ambroise Croizat, insiste toutefois sur le fait que ces premières mesures « ne touchent pas au fond du problème » et qu’il faut s’attendre à une « refonte complète de la législation » concernant la retraite des vieux travailleurs.

Au printemps 1945, le processus d’élaboration des ordonnances concernant la Sécurité sociale s’accélère. Les bureaux de la direction générale des Assurances sociales, avec à leur tête Pierre Laroque, mettent au point un projet d’organisation du nouveau système. Mais l’administration n’est pas seule à la manœuvre. 

Si la commission du Travail et des Affaires sociales devait avant tout rendre un avis sur le texte proposé, elle s’est imposée comme un lieu important de construction d’un consensus politique autour de la Sécurité sociale, grâce à plusieurs spécialistes de ces questions parmi ses membres. La commission élit le 9 mars 1945 deux représentants auprès du Conseil supérieur des Assurances sociales. Le 21 mars, elle reçoit Alexandre Parodi, le ministre du Travail et de la Sécurité sociale, qui expose la politique sociale du gouvernement. Le 27 avril, Ambroise Croizat crée une sous-commission consacrée au nouveau régime d’allocations aux vieux travailleurs : il associe directement les organisations syndicales à l’élaboration du rapport, à travers des auditions.

Le 9 juin, une commission ministérielle, connue sous le nom de la commission Delépine, est chargée d’examiner le projet relatif à l’organisation de la sécurité sociale. Cette commission compte notamment des représentants des syndicats ouvriers. Les conflits entre défenseurs et opposants à ce nouveau régime sont intenses. D’un côté, l’administration et la CGT défendent le principe de la caisse unique, qui doit réunir l’ensemble des anciennes caisses d’Assurances sociales, dans une logique d’efficacité. De l’autre, la CFTC, la Mutualité et les organisations natalistes s’y opposent, car elles perdent de leur pouvoir. Le 20 juillet, Georges Buisson communique aux membres de la commission son projet de rapport concernant le texte du gouvernement. Il est adopté à l’unanimité moins une voix, celle de Gaston Tessier (CFTC), farouche opposant à la réforme.

Dans son discours à l’Assemblée le 31 juillet 1945, Georges Buisson rappelle le rôle de cette commission dans la discussion de ce projet. Il est finalement adopté à 190 voix pour, une seule voix contre (celle du député conservateur Joseph Denais), et 84 abstentions (des démocrates-chrétiens, pour la plupart). C’est donc la majorité composée de la CGT, du PCF et de la SFIO qui a défendu politiquement le projet proposé par le gouvernement, et permis son approbation.