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8 – Une remise en cause majeure de la Sécu

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Une remise en cause majeure de la Sécu

Les « ordonnances scélérates » de 1967

Depuis sa mise en place, la Sécurité sociale fait l’objet d’attaques incessantes de la part de la droite et du patronat. Dès 1948, le général de Gaulle dénonce la hausse des dépenses sociales. De retour au pouvoir en mai 1958, il engage des politiques restrictives, comme l’instauration d’une franchise et l’augmentation de la part restant à charge de l’assuré pour les médicaments. En 1960, le pouvoir impose toutefois aux médecins le conventionnement, qui fixe des plafonds limitant le montant de leurs honoraires. Cette mesure permet à la majorité des assurés d’être réellement remboursés de leurs frais, sur la base de 80 % des tarifs conventionnés.

Quelques années plus tard, le gouvernement lance une nouvelle offensive, en reprenant le projet patronal de réforme des structures du Régime général de la Sécurité sociale. Les ordonnances Jeanneney du 21 août 1967 prévoient la séparation des risques et la création de trois caisses nationales (maladie, vieillesse et allocations familiales) bénéficiant de ressources propres. Ce démembrement de la « Sécu » renforce la tutelle de l’État.

Manifestation des employés de la Sécurité sociale contre les ordonnances Jeanneney, Paris, octobre 1967 © DR | IHS CGT

Ces ordonnances portent un coup violent contre la démocratie sociale. Les élections des conseils d’administration sont supprimées. Par ailleurs, l’introduction du paritarisme accroît la représentation du patronat dans la gestion des caisses. Avec la moitié des sièges pour le patronat (contre un quart précédemment), le rapport de force s’inverse en sa faveur face à des syndicats divisés.

La réaction des salariés ne se fait pas attendre. Dès l’annonce du projet, une grève est massivement suivie le 16 mai 1967, à l’appel de la CGT, de la CFDT, de FO et du syndicat enseignant (FEN). Le 22 juin, le parlement autorise le gouvernement à réformer par ordonnance la Sécurité sociale. La promulgation des textes deux mois plus tard renforce la mobilisation. Le 13 décembre, une nouvelle journée nationale d’action syndicale rassemble des centaines de milliers de personnes, dont 100 000 à Paris.

 

Manifestation du 17 mai 1967 © Regards | Mémoires d’Humanité / Archives départementales de la Seine-Saint-Denis

Le gouvernement tient bon, mais la colère ne faiblit pas. Quelques mois plus tard, lorsque les événements de mai-juin 1968 éclatent, l’abrogation des ordonnances de 1967 demeure au cœur des revendications syndicales.